Fours de Fusion

textes de Mario Moretti

Description

Nous ne savons pas grand chose des fours de fusions du verre avant l'invention de la canne de soufflage au I siècle avant J.C. C'est à partir de cette époque et jusqu'au VII-VIII siècle que la production verrière s'est développée à un rythme quasi industriel. On utilisa alors de grands fours à sole (les restes de certaines structures ont été trouvés en Palestine et en Egypte) capables de produire jusqu'à 10 tonnes de verre. Après la fusion, qui devait durer plusieurs jours, et peut-être même plusieurs semaines, le four était éteint, démoli, et la grande plaque de verre nu (elle avait un épaisseur de quelques dizaines de cm) était cassée pour former des blocs qui étaient transportés vers les centres secondaires où le verre était refondu dans des creusets situés dans des petits fours pour être modelés. Au Moyen-Âge et jusqu'à l'époque industrielle, le mélange était auparavant calciné à environ 800°C dans des fours à réverbère, transformé en fritte qui était ensuite fondue dans des creusets.

Fours à Creusets et Fours à Sole

Les creusets étaient formés d'un ou plusieurs conteneurs en matériau réfractaire (argile et sable siliceux, mais également la pierre ollaire à l'époque romaine) dans lesquels, après la fusion du mélange (ou de la fritte ou du verre nu) advenait la transformation du verre, puis à nouveau le chargement (processus discontinu).
Aujourd'hui encore, dans la production du verre artistique, le creuset est construit en briques résistantes à la chaleur, en matériau silico-alumineux (les parois) ou en silice (la voûte). Les creusets ont la forme d'un cylindre ouvert sur la partie supérieure ou, les plus petits, une forme elliptique. Leur capacité peut varier de quelques dizaines de kg à plus d'une tonne de verre. Le creuset est situé au centre du four, soutenu par des briques appuyées sur le banc afin que la flamme du brûleur le réchauffe de façon uniforme.
Une fois posé dans le four, le creuset doit être réchauffé lentement jusqu'à ce qu'il atteigne la température d'exercice de plus de 1000°C en quelques jours, afin d'éviter les fissures dues à la dilatation trop rapide des matériaux cristallins dont il est constitué. Arrivé à régime, le creuset peut être utilisé pendant plusieurs mois avant d'être remplacé. Le four reste toujours éclairé et la température oscille entre 1400°C (fusion) et 1000°C (transformation).
Dans les verreries artisanales plus importantes, on utilise également des cuves : il s'agit de fours sans creuset dont les parois sont recouvertes de parallélépipèdes parfaitement carrés (pour éviter l'infiltration du verre entre les joints) de matériau réfractaire électrofondu à base de silice-alumine-zirconium, très résistants à la corrosion. Dans les cuves, dont la capacité peut être de plusieurs tonnes, la flamme réchauffe le verre par rayonnement, en passant sur le bain de fusion. La flamme est alimentée au méthane (le combustible moins polluant), huile combustible et air. Pour réduire la consommation d'énergie, l'air est préchauffé dans un récupérateur de chaleur (tube métallique réchauffé par les fumées à la sortie du four).
L'utilisation du méthane ne suffit par pour réduire la pollution aux valeurs requises par les normes anti-pollution européennes en raison de la présence dans la flamme d'oxydes d'azote en quantité supérieure à la quantité autorisée. C'est pour cette raison que dans l'avenir on aura recours à la chauffe par oxycombustion (l'oxygène remplace l'air dans la flamme) ou aux fours électriques qui sont, eux, déjà très diffusés dans les pays où le coût de l'énergie électrique est faible et où l'on utilise lors de la fusion les mélanges plus polluants (comme ceux contenant des composts de plomb et de fluor).
Deux systèmes permettent de fondre le verre par un procédé électrique : irradier le creuset avec des résistances fixées aux parois du four, ou fondre le mélange dans des cuves dans lesquelles il est réchauffé par des électrodes de molybdènes immergées directement dans le verre.

Four à Bassin

Le four a bassin a été réalisé et utilisé à une époque plus récente. Il apparaît à la fin du XIX siècle, avec la naissance des formeuses qui remplacent la fabrication manuelle. Ce four est réalisé pour la production continue de verre ; les différentes phases de production qui, dans le four à creuset, se déroulent dans le temps, ont lieu ici au niveau de l'espace.
Le chargement du mélange est continu et advient à l'extrémité d'une grande cuve rectangulaire dont la superficie peut varier de quelques m2 jusqu'à presque une centaine de m2 dans le cas de four pour la préparation de plaques float et l'épaisseur du bain de verre fondu de 80 à 150 cm. En avançant vers l'extrémité opposée, le mélange fond et forme un liquide qui s'affine et devient homogène pour sortir ensuite de la cuve à travers un trou immergé (gorge) et atteindre la zone de transformation.
Ces fours peuvent produire de 100 à 1000 tonnes de verre par jour. Un four à bouteille peut produire un million de pièces par jour ! Et un four avec procédé float produit des plaques pouvant recouvrir une superficie égale à dix terrains de football !
Tout le processus, de la pesée et du mélange des matières premières jusqu'à l'emballage du produit fini est entièrement automatisé.
Les fours à bassin sont construits avec des blocs de matériaux réfractaires de différentes natures. Il s'agit en général de composts à base d'alumine et d'oxyde de zirconium. Dans les zones au contact du produit fondu, on utilise des blocs électrofondus extrêmement résistants à la corrosion car ils sont compacts et sans porosité. La voûte est en matériaux réfractaires de silice (électrofondu pour la production de verres fusibles à haute température) et les parois sont en général en matériau silico-alumineux.
L'énergie nécessaire pour atteindre la température de fusion est normalement fournie par des brûleurs à gaz et à huile et le réchauffement se fait par rayonnement. On utilise de plus en plus les fours à bassin mixte dans lesquels l'énergie est fournie par des électrodes immergées dans le bain de fusion (appoint électrique). Ces électrodes ne sont activées qu'à certains moments pour augmenter la quantité de verre produite.
En fonction de l'emplacement des brûleurs, les fours à bassin peuvent êtres classés comme suit :
a) Fours à flamme en U ou en fer à cheval (de petites dimensions, avec des productions inférieures à 200 t par jour) : l'énergie est récupérée en préchauffant l'air dans des récupérateurs métalliques préchauffés par des fumées en sortie.
b) Fours à brûleurs transversaux (les plus grands, alimentés par 4 à 6 brûleurs situés de claque côté, réglables de façon indépendante afin d'obtenir, le long de l'axe du four, la distribution de la température souhaitée). La récupération de la chaleur se fait par des régénérateurs, empilages de briques réfractaires situées sur les côtés du four, chauffées par les fumées en alternance.
En fonction du type de production, les fours peuvent contenir un seul bassin (il s'agit du four ouvert) de forme rectangulaire, allongé dans le sens d'écoulement du verre, ou deux bassins (dans le premier a lieu la fusion et l'affinage, dans le second, dit de transformation, on trouve les lignes d'alimentation (feeders) qui conduisent aux machines de formage (bouteilles, vases, verres). Les deux bassins sont reliés entre eux par une gorge.